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Les conséquences du rôle d'aidant

 

Invisibles en tant que catégorie sociale, ignorés pour leur contribution à la santé des Français, ainsi que pour les économies qu’ils font faire aux finances publiques, les aidants familiaux apparaissent peu dans le débat public et se sentent souvent isolés.

 

Ils ont souvent beaucoup de mal à raconter les épreuves traversées, les difficultés engendrées par la situation, les amis qui s’éloignent, les professionnels de santé pas toujours bienveillants.

 

Dans ces vies de tous les jours, il y a les petites victoires, les stratégies déployées pour le bien-être de l’aidé comme de l’aidant, à travers lesquelles transparaissent une vraie force, indispensable pour avancer, des vies faites de joies et de peines, de moments de découragement comme de projets, des vies (presque) ordinaires.

 

L’aidant familial vient en aide pour partie ou totalement à une personne dépendante dans les activités de la vie quotidienne.

Cette aide peut prendre plusieurs formes : soins, accompagnement, démarches administratives, veille, soutien psychologique, activités domestiques.

 

 

L’investissement est à la fois moral, humain et financier, pour l’aidant familial qui, par définition, n’est pas un professionnel de l’accompagnement.

 

 

Dans les familles touchées par le handicap, il y a une rupture brutale entre un avant et un après.

 

L’avant est une famille avec un quotidien ordinaire : gestion de la famille et de son fonctionnement, le travail, l’école, les activités, les vacances, la vie sociale des uns et des autres…

 

L’après fait suite à un évènement catalyseur ; un accident, la déclaration d’une maladie handicapante…

 

Le futur est alors en mouvement vers un autre ordre de fonctionnement qui va demander une grande capacité d’adaptation.

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Prendre en charge une personne handicapée dans sa famille est un acte de dévouement pouvant à long terme devenir une astreinte difficile à concilier avec la vie de tous les jours.

 

Les aidants ont tendance à minimiser l’impact de la situation de handicap et de l’aide qu’ils apportent sur leur vie personnelle, ils qualifient leur rôle de «normal».

 

Qui sont les aidants ?

 

 

Plus de la moitié des aidants familiaux (54%) sont les conjoints ; un tiers (34%) les ascendants et dans une moindre mesure un enfant (6%), un frère ou une sœur (3%).

 

Le conjoint aidant est dans 58% des cas une femme

 

 

CONSEQUENCES SUR LA SANTE

 

Ce rôle d’aidant impacte la santé :

 

- stress, nervosité, épuisement moral, anxiété voire angoisse.

 

- fatigue physique et notamment douleurs dorsales liées au portage des personnes présentant un handicap moteur.

 

- Les répercussions sur la santé sont d’autant plus réelles que l’aidant avance en âge.

 

 

Conséquences sur la santé physique

 

Il s’agit souvent de douleurs musculaires et dorsales, d’un manque de sommeil.

 

Mais elles ne s’appesantissent pas sur leur santé, et ne prennent pas toujours le temps de prendre soin d’elles :

« Je vais rarement chez le médecin, et quand j’y vais c’est trop tard ! ».

 

L’épuisement fait partie du quotidien :

« C’est moins dur que d’aller à la mine, c’est supportable mais le rythme est dur à tenir. C’est comme une course de fond »

 

La tendance des aidants est de minimiser l’incidence de la situation de handicap sur leur propre santé, notamment en termes de fatigue.

 

 

Conséquences sur la santé psychique

 

L’ « épuisement » physique est souvent lié à une fatigue psychique.

« Je suis souvent fatigué physiquement et surtout moralement »

 

La tendance dépressive, est en lien avec la difficulté de la situation, du soutien insuffisant (que ce soit au niveau de l’aide professionnelle extérieure, du soutien psychologique familial, amical ou professionnel).

 

Dans cette situation, la situation de handicap impacte l’état de santé de l’aidant, Les conséquences sur la santé psychique sont sans doute liées pour partie à l’impact de la situation de handicap sur la vie sociale et affective, voire professionnelle, et au sentiment d’isolement qu’il peut générer.

 

 

Résister pour « tenir le coup »

 

Souvent les aidants ont tendance à minimiser leur souffrance, leur fatigue et difficultés.

« Oui je suis fatiguée, mais c’est normal. De toute façon, si je ne fais rien, personne ne le fera »

« (…) je n’ai pas le choix. J’ai peut-être une santé psychologique plus solide que d’autres. Et puis il y a des situations plus dures que la mienne »

 

Les aidants estiment que leur fatigue, bien que justifiée par ce qu’ils font quotidiennement, est mineure par rapport à la souffrance de la personne qu’ils aident. Ils ne conçoivent pas leur souffrance séparément de celle de la personne qu’ils aident, et n’osent pas toujours formuler une véritable plainte par rapport à leur propre fatigue.

 

Cette minoration est une manière de résister, de « tenir le coup » au regard de la charge que représente le rôle d’aidant et de l’impact de ce rôle sur la situation de l’aidant.

 

 

 

CONSEQUENCES SUR LA VIE SOCIALE

 

L’aide apportée a une incidence sur la vie sociale et ce, quel que soit le lien de parenté avec la personne aidée.

 

L’impact de la situation de handicap sur la vie de l’aidant est en général confondu avec l’impact sur la vie de la personne handicapée, a fortiori lorsque l’aidant est le conjoint ou l’ascendant de l’aidé.

 

La réduction du cercle relationnel et amical est aussi une conséquence : « Il est difficile d’inviter des amis » , « Impossible d’accepter des invitations sauf lorsqu’elles sont programmées très en avance ».

 

Ces conséquences peuvent aboutir à un isolement.

 

Les causes de cette réduction de la vie sociale

 

Les conséquences sur la vie sociale sont liées non seulement à l’état de santé de la personne handicapée, mais aussi – et surtout ! – à l’environnement qui peut intervenir en tant qu’obstacle dans la réalisation d’activités et la participation sociale.

      

On peut rappeler la définition du handicap telle que retenue par la loi du 11 février 2005 qui préconise une approche globale et situationnelle du handicap, décrivant celui-ci comme une interaction entre la personne et son environnement. « On ne se rend que dans les lieux de plain-pied ou avec ascenseur. » , « Mauvais aménagements des salles de       cinéma, des trottoirs, des magasins, des hôtels, des accès aux gares, aux métros … »

 

Pour ce qui relève directement de l’état de santé de la personne, c’est plutôt une grande fatigabilité qui conduit à limiter les sorties.

 

C’est aussi l’attitude de l’entourage – en tout cas la perception que peuvent en avoir la personne handicapée et l’aidant – qui peut avoir tendance à réduire leur participation sociale.

 

Il peut s’agir d’une réticence à sortir en raison du « regard des autres », voire d’un « rejet ».

 

Mais c’est aussi l’attitude des gens connus, et même des amis, qui est en cause :

« Certains amis se sont un peu éloignés, et c’est pénible d’aller les voir avec mon fils. »

 

« Lorsqu'on a un enfant handicapé, les gens se détournent très vite de vous, quelques personnes de la famille        aussi et nous ne vivons que par la maladie », « On se retrouve tout seul, on manque de compassion. »

 

C’est enfin le manque de relais (professionnel ou non) et la difficulté (voire l’impossibilité) pour l’aidant principal de s’absenter en laissant seule la personne handicapée qui conduit à limiter les sorties.

 

« Ma liberté d'aller et venir est tout à fait limitée du fait qu'il refuse de systématiquement de m'accompagner sous prétexte que ce n'est pas facile pour lui. Il aimerait bien que je le laisse seul mais je me sens pleinement responsable et n'ose imaginer ce qui se passerait s'il lui arrivait un accident en mon absence. »

 

On voit apparaître à travers cette citation le sentiment de responsabilité / culpabilité

 

 

L’isolement

 

La présence continue de l’aidant auprès de la personne handicapée, la limitation des sorties ainsi que la réduction du cercle relationnel et amical peuvent aboutir à un réel isolement – à la fois de la personne aidée et de l’aidant. 

 

Cet état de fait est souvent ressenti comme une fatalité, un poids.

 

« C’est beaucoup mieux d’être seul. De toute façon les gens aussi ont peur et préfèrent fuir ou pire, ils sont indifférents mais ont un discours contraire »

 

« Il n’y a plus personne mais finalement c’est très bien. »

 

 

CONSEQUENCES SUR LE NIVEAU DE VIE

 

Situation professionnelle et revenus

 

Le choix de cesser une activité professionnelle peut avoir une incidence sur les revenus, et se décider au détriment de la situation financière.

« Actuellement avec les revenus de mon conjoint, l’arrêt de mon activité ne pose pas de problèmes.»

Cette incidence sur les revenus peut ainsi être directement liée à une cessation ou un aménagement de l’activité professionnelle de l’aidant en raison de la situation de handicap.

 

Le coût du handicap

 

En termes de répercussion sur les revenus dont disposent les aidants, est souvent cité le coût directement lié au handicap. Les principales difficultés financières concernent les aménagements des habitations. Le poids du handicap sur les revenus, malgré la notion de compensation des conséquences du handicap telle qu’introduite par la loi du 11 février 2005, peut être lié :

 

- À la lenteur des démarches administratives pour obtenir les aides financières nécessaires à l’adaptation du matériel pour la personne handicapée, y compris pour des situations urgentes qui requièrent des procédures simplifiées ;

 

- Au fait que certains coûts engagés ne sont pas forcément compensés à hauteur des montants dépensés – les aménagements n’étant pas toujours intégralement remboursés par les aides ;

 

Enfin, au fait que certains frais particuliers, certaines dépenses dues à la spécificité du handicap ne sont pas prises en compte par les aides.

 

LE POIDS DE L’AIDE APPORTEE

 

La charge est d’autant plus importante que la durée quotidienne d’aide augmente.

 

Souvent, les aidants considèrent leur charge comme légère :

 

                     « Car c'est ma fille, c’est naturel. »

                     « C’est une charge légère parce que c'est mon conjoint. »

                     « C’est une évidence de s’en occuper. »

 

Leur rôle d’aidant, quel que soit leur lien familial avec la personne handicapée, est   un devoir qu’ils ne veulent pas remettre en question.

 

 

« Je pense qu'il est plus facile d'être aidant avec son enfant qu'avec une personne étrangère. C'est pourquoi les attentes et les besoins sont moins évidents. C'est comme choisir entre sa carrière et son enfant, je pense qu'une mère n'a pas le choix et ne se pose même pas la question. C'est un avis personnel mais je crois que je ne suis pas la seule. »

 

 

LES INFORMATIONS SUR LA LEGISLATION ET LES DEMARCHES ADMINISTRATIVES

 

Le besoin de davantage d’informations concernant les démarches administratives et/ou sur la législation est prégnant :

 

       « On n’est pas tous égaux en terme d’information. »

       « On a des droits qu’on ne connaît pas. »

       « Il faut aller à la pêche aux      informations. »

    « On n’est informé de rien quand on devient invalide. On apprend  tout par soi-même, coup par coup. Vous êtes invalides, débrouillez-vous.»

 

Des problèmes de délais et de lenteur des procédures posent problèmes…

 

« Les démarches devraient se faire automatiquement, car quand ça nous tombe dessus, on a autre chose à penser, ce n’est pas le moment. »

 

La dimension administrative apparaît comme une difficulté pour beaucoup d’aidants, certains parlent de « tracasseries administratives », perte des papiers par les organismes, lourdeur de la gestion administrative... Ils consomment beaucoup de temps et d’énergie à trouver la bonne information et le bon interlocuteur.

 

L’intervention des associations s’avère alors utile.

 

 

LE REPIT

 

Ce besoin, dont l’aidant peut ne pas avoir conscience, pourra être repéré et exprimé par la personne aidée.

 

Certains aidants, sans même s’autoriser à s’interroger sur leur besoin de souffler, vont évacuer toute idée de répit. Ils peuvent se sentir « coincés », « obligé(s) et contraint(s) » par leur rôle, considérant que leur « présence est nécessaire à chaque instant ».

 

Ils jugent souvent que c’est la personne aidée elle-même qui souhaite la présence et l’aide exclusive de l’aidant familial.

 

«Il ne comprendrait pas mon absence »

 

Le sentiment de responsabilité apparait plus fort que la fatigue et l’usure, tel un ‘conditionnement’. Il est dès lors associé au sentiment de culpabilité à l’idée de « laisser », d’’abandonner’ la personne qui a besoin de lui.

 

C’est parfois par la force des choses que l’aidant peut prendre conscience de son besoin de répit. Ainsi, lorsque la personne handicapée est hospitalisée plusieurs semaines, le répit s’’impose’ :

 

« Je suis en vacances , j’ai besoin de sommeil, et je dors ».

 

Le terme de « vacances » faisant référence au vocabulaire de l’activité professionnelle,

elle sous-entend que le rôle d’aidant constitue un travail à part entière.

 

 

 

 

 

 

 


22/11/2016
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  Statut juridique des aidants en France et chez nos voisins

   L'aidant et la Loi

 

   Collectif Inter-Associatif des Aidants Familiaux (CIAAF)

 

 

   Question/Réponse au Sénat

 

 Vous remarquerez dans ce lien la rapidité de réponse du Ministère.

 

Le guide des étapes clés pour les aidés et les aidants

 

  Questionnaire du Sénat sur les MDPH datant de 2012 et toujours actif !

 

   Pétition de l'APF " Stop à l'indécence" a eu gain de cause

 4 NOV. 2015 — L’alerte « Stop à l’indécence »

sur les économies prévues par le gouvernement sur le dos des personnes en situation de handicap a été entendue ! 

Plus de renseignements ici

 

 

   Loi Handicap au Sénat des avancées réelles, une application encore insuffisante.

Rapport d'information fait au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois sur l'application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Session extraordinaire de 2011-2012, enregistrée à la Présidence du Sénat le 4 juillet 2012.

 

   Très intéressante intervention de Philippe Croizon (28 janvier 2017), qui interpelle Rama Yade: "Personne ne parle du handicap !" #ONPC 

            


 Sondage IFOP sur le handicap dans la campagne électorale 2017 .... 

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11/11/2016
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